Référendum Constitutionnel 2023 : Le Secrétariat Général du Gouvernement fait un zoom sur le contenu, les innovations des textes constitutionnels

  1. Selon l’article 90 du projet de Constitution, le Président de la République nomme en Conseil des ministres aux hautes fonctions civiles et militaires de l’Etat selon les principes d’égalité, d’équité et de compétences conformément à la configuration territoriale du Tchad. Cette disposition est une réponse aux préoccupations exprimées par la majeure partie des Tchadiens en ce qui concerne les nominations à des postes de responsabilité dans l’administration civile et militaire. Une loi organique vient préciser et compléter les conditions de mise en œuvre de cette disposition.
  2. L’article 68 du projet de Constitution fixe l’âge minimum de candidature pour l’élection présidentielle à 35 ans. Cette disposition crée les conditions d’une démocratie renforcée et d’un jeu électoral ouvert en donnant la possibilité aux jeunes de briguer la magistrature suprême. Elle met fin aux débats liés à l’âge pour la participation à l’élection présidentielle juge exclusif à un moment donné de l’histoire du Tchad.
  3. L’article 67 alinéa 2 du projet de Constitution dispose : « il (le Président) de la République est rééligible une fois pour un mandat consécutif ». Cette disposition remet dans la Loi fondamentale le verrou contre une présidence prolongée et met ainsi fin aux débats très controversés sur la question de l’alternance au pouvoir dont les conditions sont ainsi désormais réunies.
  4. L’article 66 alinéa 2 du projet de Constitution dispose que le Président de la République incarne l’unité nationale. Cette disposition est d’une importance fondamentale en ce qu’elle fait du Président de la République, la clef de voûte et la plus haute autorité de la République, le symbole de l’unité nationale qui est chère et recherchée par l’ensemble des Tchadiens.
  5. Le projet de Constitution consacre le titre 17 à l’Agence nationale de gestion des élections en abrégé ANGE. L’article 236 précise que l’ANGE est une structure nationale indépendante et permanente. L’article 237 dispose que l’Agence nationale de gestion des élections est chargée de l’organisation et de la gestion de toutes les opérations électorales et référendaires et l’article 238 ajoute qu’elle « agit en toute indépendance, impartialité, transparence et professionnalisme. »
    La constitutionnalisation d’un organe dédié aux élections générales est une avancée démocratique majeure. D’abord en ce qui concerne son fondement juridique quand on sait que la Commission électorale nationale indépendante (CENI) est créée par une loi et non prévue par la Constitution comme c’est le cas de l’ANGE. Ensuite, l’ANGE, contrairement aux anciennes CENI, est une structure permanente. Le caractère permanent de cette structure dont les membres bénéficieront d’un mandat fixe et d’un statut particulier, la met à l’abri de certaines influences et faiblesses fortement décriées par les acteurs politiques et sociaux. Il garantit son indépendance.
    Le caractère indépendant de l’ANGE est renforcé par l’article 239 qui précise, d’une part, qu’elle n’entretien aucun lien hiérarchique avec les autres institutions de l’Etat et, d’autre part, qu’elle est autonome dans la prise des décisions dans le cadre de l’exercice des attributions qui sont conférées.
    La constitutionnalisation de l’ANGE est la traduction en acte d’une des plus importantes résolutions du DNIS. L’organisation et la gestion des élections au Tchad par les différentes CENI qui se sont succédé ont toujours été très controversées ; ce qui a donné lieu à des débats houleux et passionnés au DNIS. C’est dans le souci de créer les meilleures conditions d’organisation des élections crédibles, transparentes et libres que les participants ont fortement recommandé la mise en place d’un organe indépendant et transparent. La consécration constitutionnelle d’un tel organe est une volonté politique forte qui s’inscrit dans le cadre de l’apaisement du climat politique et social favorable au retour rapide à l’ordre constitutionnel.
    L’ANGE est compétente pour organiser et gérer les élections générales, c’est-à-dire la présidentielle, les législatives, les sénatoriales ainsi que les provinciales et les communales.
  6. Selon l’article 159 du projet de Constitution « Le Président de la Cour suprême préside le Conseil supérieur de la magistrature ». Cette disposition est une innovation importante par rapport au passé judiciaire du Tchad où toutes les Constitutions font du Président de la République le Président du Conseil supérieur de la magistrature. En écartant le Président de la République de la présidence du Conseil supérieur de la magistrature, le projet de Constitution apporte une réponse adéquate à deux importantes recommandations du DNIS, à savoir : « réaffirmer l’indépendance du Conseil supérieur de la magistrature » et « Combattre l’immixtion de l’exécutif dans le cours normal de la justice ».
    Le projet de Constitution va plus dans l’affirmation de l’indépendance de la Justice à travers les articles 160 et 161 qui disposent respectivement : « Le Conseil supérieur de la magistrature propose les nominations et statue sur les avancements des magistrats » et « Les magistrats sont nommés par décret du Président de la République conformément aux propositions du Conseil supérieur de la magistrature ». Ces deux articles sont complétés par l’article 163, alinéa 2 qui dispose que les magistrats du siège sont inamovibles. Le Conseil supérieur de la magistrature devrait jouer ainsi un rôle incontournable dans le fonctionnement de l’appareil judiciaire conformément à une des recommandations du DNIS selon laquelle il faut « respecter le principe d’inamovibilité des magistrats du siège et les critères légaux de nomination et des affectations des magistrats ».
    L’article 170 du projet de Constitution dispose que « jusqu’à leur codification, les règles coutumières et traditionnelles ne s’appliquent que dans les communautés où elles sont reconnues » mais exclut les coutumes contraires à l’ordre du public ou celles qui prônent l’inégalité entre les citoyens.
    Les règles coutumières et traditionnelles, notamment en matière de régimes matrimoniaux et de successions ne peuvent s’appliquer, selon l’article 171 du projet de Constitution, que dans les communautés où elles sont reconnues et avec le consentement des parties. Ces règles réaffirmées par le projet de Constitution renforcent la justice et l’égalité entre les citoyens tchadiens comme fortement recommandées par les participants au DNIS.
    Le titre 6 consacré au pouvoir judiciaire répond ainsi au souci majeur de l’ensemble des Tchadiens d’avoir un appareil judiciaire plus indépendant qui protège mieux les droits des citoyens et garantit l’égalité et la justice.
  7. Le titre 5 consacré aux rapports entre le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif indique, à travers l’article 132 du projet de Constitution, les matières qui relèvent du domaine de la loi et précise, dans l’article 133, que les matières autres que celles qui sont du domaine de la loi ont un caractère réglementaire.

En ce qui ce qui concerne le domaine de la loi, l’innovation introduite par le projet de Constitution vient du fait que plusieurs nouvelles matières sont ajoutées. Ce sont :

  • la promotion féminine ;

– les principes fondamentaux de l’organisation des forces de défense et de sécurité ainsi qu’une Charte des droits et des devoirs des membres ;

  • la procédure civile ;
  • la nationalisation et la privatisation des entreprises ;
  • l’exercice du service civique et du service militaire ;
  • la déclaration du patrimoine et la liste des personnes assujetties à cette obligation ;
  • les catégories des personnalités et agents assujettis à cette obligation ainsi les formules du serment ;
  • l’organisation de l’Administration générale, le statut générale de la fonction publique ;
  • la libre administration des Collectivités autonomes, de leurs compétences et de leurs ressources.

Une autre innovation introduite par le titre 5 concerne la déclaration de guerre. Ainsi, l’article 134 dispose : « la déclaration de guerre est autorisée par le Parlement réuni en Congrès ». Le recours à l’autorisation du Parlement réuni en Congrès encadre ainsi le pouvoir du Président de la République en ce qui concerne la déclaration de guerre.
Le titre 5 consacre une autre innovation importante : selon l’article 137 du projet de Constitution, les matières soumises à l’autorisation de légiférer par voie d’ordonnance sont énumérées et motivées dans la demande adressée au Parlement.
Une dernière innovation importante à signaler concerne les lois de finances. L’article 141 du projet de Constitution dispose qu’elles déterminent les ressources et les charges de l’Etat dans les conditions et sous les réserves prévues par une loi organique et conformément aux principes généraux de transparence et de bonne gouvernance.

  1. Le titre 2 du projet de Constitution introduit plusieurs innovations par rapport à la Constitution du 31 mars 1996.
    En ce qui concerne les droits, le projet de Constitution a consacré deux droits importants : le droit d’opposition et la promotion des droits politiques de la femme.
     S’agissant du droit d’opposition, il est constitutionnalisé, à travers article 32 qui dispose : « La Constitution garantit le droit d’opposition démocratique. La loi fixe le statut de l’opposition démocratique ». La consécration du droit d’opposition est une avancée hautement démocratique.

 article 34 : « l’Etat œuvre à la promotion des droits politiques de la femme par une meilleure représentation dans les assemblées élues, les institutions, les administrations publiques. Les conditions d’application de cette sont précisées par la loi ».

  1. Le projet de Constitution apporte plusieurs innovations en ce qui concerne la décentralisation, notamment les entités décentralisées que sont les Collectivités autonomes. Ces améliorations apportées à la Constitution du 31 mars 1996 sont une réponse aux nombreuses préoccupations exprimées lors du DNIS et en application des résolutions et recommandations prises dans ce sens.

Ainsi, pour tenir compte des difficultés de mise en œuvre de la décentralisation à quatre niveaux (communautés rurales, communes, départements et régions) prévue par la Constitution du 31 mars 1996, le projet de Constitution a ramené le niveau de décentralisation à deux, à travers l’article 254 qui dispose : « Les Collectivités autonomes de la République du Tchad sont : les Communes, les Provinces ». En ramenant le niveau de décentralisation à deux, le projet de Constitution apporte ainsi une réponse adéquate à la question de la difficulté d’application de la décentralisation à quatre niveaux qui nécessitent des moyens de fonctionnement des Collectivités autonomes extrêmement lourds. Le projet de Constitution fixe le niveau de décentralisation à deux et oblige l’Etat, d’une part, à veiller au développement harmonieux de toutes les Collectivités autonomes sur la base de la solidarité nationale, des potentialités et de l’équilibre territoriaux et, d’autre part, à leur permettre de disposer librement de leurs ressources. Les Collectivités autonomes ont des compétences exclusives et des compétences partagées avec l’Etat dans les conditions fixées par une loi précise l’article 162.

Renvoyant le nombre, les dénominations et les limites territoriales des Collectivités autonomes à une loi organique (article 255), le projet de Constitution a innové en prévoyant qu’« aucune Collectivité autonome ne peut exercer une tutelle sur une autre » C’est l’Etat qui assure la tutelle des Collectivités autonomes, représenté par les chefs des unités administratives déconcentrées qui sont chargés de défendre les intérêts nationaux et de faire respecter les lois et règlements, d’après l’article 261.

Une autre innovation importante introduite par le projet de Constitution concerne la création d’une fonction publique locale. Selon l’article 263 : « Les Collectivités autonomes sont dotées d’une fonction publique locale. Elles recrutent leurs agents et gèrent leurs carrières » Cette disposition a l’air d’une révolution qui viendra apporter des réponses appropriées aux multiples préoccupations liées aux recrutements des fonctionnaires et autres agents de l’Etat, à la gestion de leur carrière et de leur retraite. La fonction publique locale permettra de désengorger la Fonction publique nationale et, comme les Collectivités autonomes votent et exécutent leur budget (article 264), elles apporteront elles-mêmes les meilleures solutions aux besoins et préoccupations des agents qu’elles utiliseront.

  1. Parmi les innovations majeures introduites par le projet de Constitution, il convient de mentionner de manière particulière la création de la Justice militaire, à coté de la justice civile dont la Cour suprême est la plus haute juridiction. Désormais, si le projet de Constitution est approuvé, le Tchad se dotera d’une justice militaire qui est une nouvelle institution par rapport à la Constitution du 31 mars 1996.
    La Justice militaire est une nouvelle institution judiciaire militaire composée de magistrats militaires. Elle comprend la Haute cour militaire, la Cour d’appel militaire et des tribunaux militaires selon l’article 198 du projet de Constitution.
    L’article 199 dispose que la Haute cour militaire connaît en dernier ressort les décisions rendues par la Cour d’appel et les tribunaux militaires dans les conditions définies par la loi.

La Haute cour militaire connaît au premier degré de toutes les infractions d’atteinte à la sûreté de l’Etat et des crimes commis par les militaires quel que soit leur grade. Quant à la Cour d’appel, elle connait en appel des jugements rendus par les tribunaux militaires selon l’article 200. La compétence des tribunaux militaires est fixée par l’article 201 qui dispose : « les tribunaux militaires connaissent au premier degré de tous les délits, contraventions et infractions connexes commis par les militaires et assimilés quel que soit leur grade et/ou leur statut. »

Le projet de Constitution ne pose que les grands principes et les règles générales concernant la Justice militaire. Il renvois les attributions, les règles de désignation des membres, d’organisation et de fonctionnement ainsi que la procédure suivie devant les juridictions militaires à la loi (article 202).

L’institution de la Justice militaire est une réponse satisfaisante à l’une des préoccupations les plus exprimées du DNIS. En effet, lors des débats les plus houleux et passionnés au sujet des comportements déviants des forces de défense et de sécurité, les participants ont insisté sur la nécessité de créer une justice militaire spécifique dédiée aux forces de défense de défense et de sécurité. Des recommandations claires ont été formulées dans ce sens.

Pour traduire la volonté des participants du DNIS d’opérer un changement radical dans le fonctionnement de la Justice en réprimant les comportements des militaires au même titre ceux des civils, le Comité chargé de l’élaboration de l’avant-projet de Constitution a prévu la création de cette juridiction spécifique avec plusieurs niveaux. Avec cette juridiction, les militaires, quel que soit leur grade, sont poursuivis lorsqu’ils se rendent coupables d’une infraction, qu’elle soit une contravention, un délit ou une atteinte à la sûreté de l’Etat.

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