Karim Benzema, un écran de fumée idéal pour Gérald Darmanin ?

Le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin a détourné l’attention des critiques le concernant en accusant le footballeur Karim Benzema d’entretenir des liens avec les Frères musulmans. Il reprend ainsi à son compte une vieille tradition de l’extrême droite qui consiste à s’en prendre aux footballeurs naturalisés ou issus de l’immigration, coupables selon elle d’être de « mauvais Français ».

La polémique bat son plein depuis cinq jours. En accusant Karim Benzema d’être « en lien notoire avec les Frères musulmans », lundi 16 octobre sur CNews, le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin a déclenché un emballement politico-médiatique qui ne s’arrête plus. Et a mis fin, par la même occasion, aux critiques dont il était l’objet pour sa gestion du terrorisme en France.

Cette stratégie de l’écran de fumée a d’ailleurs été pointée du doigt, vendredi 20 octobre, par Marine Le Pen. « Monsieur Darmanin a bien appris la leçon de Charles Pasqua [ancien ministre de l’Intérieur, NDLR] qui disait : ‘quand une affaire vous gêne, il faut créer une affaire dans l’affaire. Et puis si ça ne suffit pas, une affaire dans l’affaire de l’affaire, jusqu’à ce que plus personne n’y comprenne rien’. (…) La mise en cause de Monsieur Benzema, qui ne vit même plus en France, de la part du ministre de l’Intérieur, est une diversion alors que nous sommes confrontés à des problèmes majeurs », a déclaré la cheffe de file des députés du Rassemblement national (RN) sur RMC.

Jusqu’à ses déclarations visant l’ancien buteur du Real Madrid, Gérald Darmanin était en effet la cible de la droite et de l’extrême droite, qui mettaient en cause sa gestion du terrorisme après l’assassinat de Dominique Bernard, enseignant du collège-lycée Gambetta d’Arras tué le 13 octobre par un jeune radicalisé.

« Combien de Français allons-nous regarder mourir ? », s’est alors insurgé sur X le patron des députés Les Républicains (LR) Olivier Marleix. « Ce nouvel attentat symbolise toute l’impuissance de notre État ».

Le président de LR, Éric Ciotti, a demandé quant à lui l’instauration de « l’état d’urgence », exhortant l’exécutif à « ne plus trembler face à l’islamisme et à l’immigration de masse ». Avant l’attaque d’Arras, il avait déjà regretté la tenue en France, malgré leur interdiction, de manifestations pro-palestiniennes – « un signe de faiblesse de l’État », selon lui. « Le ministre de l’Intérieur n’est pas en mesure de faire respecter les décisions que lui-même a prises », a-t-il fustigé.

L’extrême droite a demandé de son côté une audition à l’Assemblée nationale de Gérald Darmanin et a même appelé à sa démission. « Il y a eu des failles dans toute la chaîne de responsabilités, qui devraient conduire à la démission immédiate du ministre de l’Intérieur », a déclaré sur X Jordan Bardella, président du RN, avant de dénoncer, un peu plus tard, une « faillite morale et politique du gouvernement ».

Enfin, Éric Zemmour, président du parti Reconquête !, a dénoncé les « discours faussement martiaux », « l’incapacité » et « l’impuissance du pouvoir politique », interrogeant : « qu’est-ce qu’ils ont fait depuis trois ans ? » et l’assassinat de Samuel Paty.

« Un personnage clivant » qui revendique sa foi musulmane

C’est alors qu’arrive la polémique Karim Benzema, qui avait exprimé, la veille sur X, sa compassion pour les habitants de Gaza, dans laquelle droite et extrême droite se sont engouffrées. Quant aux critiques portant sur l’action de Gérald Darmanin, elles se sont tues ou sont devenues inaudibles.

La sénatrice LR Valérie Boyer a ainsi demandé, si les accusations du ministre de l’Intérieur étaient avérées, la « déchéance de nationalité » pour Karim Benzema, par ailleurs qualifié « d’agent de propagande du Hamas » et de « Français de papier » par l’eurodéputée LR Nadine Morano.

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