François Tombalbaye, connu aussi sous le nom de Barka, n’était pas destiné à une carrière politique. C’est un concours de circonstances qui l’a propulsé sur cette voie. Enseignant dévoué et compétent, il exerçait dans l’ancienne Préfecture du Chari-Baguirmi avant d’être nommé Directeur de l’école de Koumra, dans l’actuelle province du Mandoul.
Tombalbaye était un enseignant hors pair, soucieux de l’avenir de ses élèves. Il n’hésitait pas à les impliquer dans des travaux manuels, comme la culture du coton dans la cour de l’école. En 1948, lui et ses élèves ont même battu un record de production dans tout le Mandoul, récoltant et vendant pour quatre mille francs CFA de coton.
L’argent de cette récolte, Tombalbaye a souhaité en faire un cadeau mémorable pour ses élèves. À cette époque, seul le chef de district, un colon français, possédait un dictionnaire. Tombalbaye, après l’avoir acquis, l’a mis à la disposition de ses élèves.
Un jour, le chef de district français, arrogant et méprisant, gifle Tombalbaye devant ses élèves. Ce dernier ne se laisse pas faire et le terrasse. Cet acte de bravoure est un tournant. Tombalbaye devient une figure populaire, un symbole de résistance contre le colonialisme.
Suite à cet événement, Tombalbaye est muté à Fort-Archambault (actuel Sarh). C’est là qu’il est piqué par le virus de la politique et adhère au PPT/RDA. Il gravit les échelons, est élu député à l’Assemblée constituante, puis prend la tête du gouvernement en 1959, menant le pays à l’indépendance le 11 août 1960.

En 1972, il rompt avec la France et avec Israël ; il renoue les relations avec le Soudan et avec la Libye, qui cesse alors d’aider le Frolinat ; dans le même temps, il se tourne vers les États-Unis. Pendant l’été de 1972, pour imiter Mobutu, et au nom de l’authenticité chère au président zaïrois, il lance la « révolution culturelle » qui remet en valeur les traditions et coutumes ancestrales et exalte la « tchaditude ». Il débaptise le P.P.T., lui faisant prendre le nom de Mouvement national pour la révolution culturelle et sociale (M.N.R.C.S.), change le nom de la capitale Fort-Lamy en N’Djamena, rétablit les chefferies traditionnelles, impose, en particulier aux fonctionnaires, le retour aux rites d’initiation (yondo). Ces mesures heurtent profondément les chrétiens sur lesquels s’appuyait le régime et qui viennent grossir les rangs de l’opposition. Enfin, il arrête son chef d’état-major, le général Malloum (qui lui succédera), et plusieurs personnalités, dont la présidente de l’Union des femmes de son propre parti, Kaltourna Guembang.
François Tombalbaye, homme humble et affable, est devenu le premier président du Tchad indépendant. Son principal défaut, selon certains, a été de dissoudre les partis politiques au nom de l’unité nationale. Cette décision a sans doute contribué à sa chute, le 13 avril 1975.