Tanzanie : une présidentielle sans opposition

Les Tanzaniens votent ce mercredi 29 octobre 2025 dans un climat d’intimidation. La présidente sortante Samia Suluhu Hassan, quasiment seule en lice, est accusée de dérive autoritaire tandis qu’Amnesty International dénonce une « vague de terreur » orchestrée par le pouvoir.

Les électeurs se sont rendus aux urnes dès 7h00 du matin à Dar es Salaam et à Zanzibar, mais le scrutin ne présente aucun suspense. Les principaux rivaux de la cheffe de l’État ont été écartés du jeu : le leader du parti Chadema, Tundu Lissu, est emprisonné pour trahison, et Luhaga Mpina, de l’ACT Wazalendo, a été disqualifié pour des motifs de procédure.

Même au sein du parti au pouvoir, Chama Cha Mapinduzi (CCM), les critiques sont étouffées. L’ancien diplomate Humphrey Hesron Polepole, devenu opposant, a disparu depuis plusieurs semaines. Une vidéo publiée par son frère montre sa maison saccagée, avec des traces de sang visibles au sol.

Une « vague de terreur » dénoncée par Amnesty

La campagne électorale s’est déroulée dans un climat de peur. Amnesty International alerte sur des « disparitions forcées, arrestations arbitraires, actes de torture » et même des exécutions extrajudiciaires.

Le barreau du Tanganyika dénombre au moins 83 disparitions d’opposants depuis l’arrivée au pouvoir de Samia Suluhu Hassan en 2021.

Considérée au départ comme une dirigeante réformatrice après le règne autoritaire de John Magufuli, la présidente est désormais accusée de poursuivre la même logique répressive.

« Nous pensions que Magufuli était un accident de parcours… Je crains que ce ne soit désormais la nouvelle norme », confie un analyste de Dar es Salaam sous couvert d’anonymat.

L’économie progresse, la démocratie recule

La Tanzanie affiche pourtant de bons chiffres économiques : +5,5 % de croissance en 2024, selon la Banque mondiale. Agriculture, mines et tourisme continuent de tirer la croissance. Durant sa campagne, Samia Suluhu Hassan a mis en avant ses grands projets d’infrastructures et promis une assurance maladie universelle.

Mais cette réussite économique masque mal le recul démocratique. Les manifestations sont quasi inexistantes et la majorité des citoyens semblent davantage préoccupés par l’emploi que par les libertés politiques.

Une tradition autoritaire qui perdure

Depuis l’indépendance en 1961, la Tanzanie peine à rompre avec son passé autoritaire. Sous Julius Nyerere, le pays vivait sous un régime à parti unique.

Malgré l’introduction du multipartisme en 1992, aucune alternance politique réelle n’a eu lieu. En 2024, le CCM avait déjà remporté près de 99 % des sièges lors des élections locales, jugées truquées par l’opposition.

Le pouvoir mise sur la force

Face à la peur de troubles, la police a arrêté 17 personnes dans la région de Kagera et renforcé sa présence sur tout le territoire.

« Ceux qui n’ont pas participé au scrutin ne doivent pas chercher à perturber notre élection. » Si la sécurité semble assurée, la liberté, elle, recule dangereusement. En Tanzanie, la démocratie paraît plus que jamais sous haute surveillance.

DANWE AMOUGOU/STAGIAIRE

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